La neuvaine
Je ne serais pas allé voir le film «La neuvaine», car je me disais que ce devait être un autre film québécois qui ridiculise la foi catholique. Une chance que j’ai lu dans LeDroit une lettre à l’éditeur de Jacques Gauthier qui donnait l’heure juste.
Ce n’est pas un film de divertissement, mais c’est un film réjouissant en fin de compte. Les deux personnages en scène, François (un jeune homme très simple, quasiment trop simple, qui fait une neuvaine à sainte Anne pour la guérison de sa grand-mère mourante qui l’a élevée) et Jeanne (une femme médecin qui fait une dépression et est tourmentée parce qu’une de ses patientes et son bébé se sont fait tuer devant ses yeux par le mari) sont incarnés avec vérité et sobriété par Patrick Drolet et Élise Guilbeault.
La plus grande partie du film se passe dans Charlevoix, en automne, au sanctuaire de Ste-Anne-de-Beaupré et à Petite-Rivière-Saint-François, avec un bref détour à Cap-Tourmente, à un tournant du film. Le rythme est au ralenti: la musique est lente, le Fleuve est large et lumineux, les silences sont prolongés. Il faut deviner ce qui se passe à l’intérieur des personnages tellement le jeu des visages est minimaliste et le dialogue simple et réduit au minimum. C’est justement l’intériorité qui attirera ou rebutera le spectateur selon son expérience de vie.
Je dirais que l’oeil de la caméra est respectueux, plein d’égards pour tout ce qu’il entrevoit. Les images sont pleines d’ombres et de lumières. (À la rigueur ce pourrait être un film en noir et blanc, un combat entre la ténèbre et la clarté.) Le réalisateur Bernard Émond a su trouver les interprètes et le photographe (Jean-Claude Labrecque) qu’il lui fallait pour nuancer son récit. Il a surtout su trouver le ton juste pour que son propos passe la rampe.
Comme dit ma femme, il fallait beaucoup de cran pour prendre le risque de faire un tel film, en misant sur la maturité du public. Il fallait un peu de génie pour pouvoir ainsi camper la victoire de la vie sur la mort, de la sérénité sur la violence avec tant d’aplomb.
La bonté du croyant et l’altruisme de l’incroyante se croisent de façon providentielle. La complicité et la compassion sont possibles entre deux êtres profondément humains à leur façon, même s’ils sont issus de deux univers culturels aux antipodes. C’est comme une rencontre à la croisée des chemins entre la campagne et la grand ville, la tradition et la modernité, la simplicité et le raffinement, la sérénité et la violence.
Pour le croyant que je suis, c’est un exemple d’une prière qui est exaucée mais pas de la manièreespérée. Le décès de la grand mère permet une réflexion juste sur la bonne mort, la belle mort. La souffrance de Jeanne se résorbe grâce à sa rencontre d’un univers religieux mais surtout d’êtres profondément humains. La foi, l’espérance et l’amour sont au rendez-vous.
Ce n’est pas un film «religieux», mais son propos, son contexte et son ton permettront à tous les gens de bonne volonté de s’asseoir dans la même salle et de goûter un même plaisir devant une oeuvre belle qui aide à réfléchir sur le sens de la vie et de la mort.
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