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--- Réflexions personnelles en marge de mon actualité, à la mémoire de Jean Paul II --- Blogue catholique francophone ---

2005-11-11

Celui qu'on appelle Jésus

Maurice Gaudreault est en ville. Je suis convaincu que son esprit plane autour des sculptures d’argile de sa collection «Celui qu’on appelle Jésus» qui fait le tour des écoles présentement et que le grand public pourra admirer au Patro les 28-29-30 novembre, de 13 h à 17 h et de 19 h à 20 h 30. Son esprit y plane, car il a mis tellement de lui-même dans cette série que plusieurs estiment comme son meilleur travail.

Je suis originaire de Kapuskasing et je connais l’artiste sans l’avoir connu personnellement pour avoir entendu parler de lui par des gens de ma parenté qui l’ont côtoyé. J’ai aussi pu admirer les œuvres de sa collection «J’ai souvenir encore…» qui ont été exposées au Centre national des Arts en 2001. Je l’ai revue cet été à Kap.

On raconte qu’il a numéroté toutes ses oeuvres et que la dernière, complétée juste avant sa mort par suite du cancer, pour le 50e anniversaire de mariage de M. et Mme René Filion de Moonbeam, avait pour numéro 1148. Il s’est mis tard au métier de sculpteur de figurines et il n’a pas exercé un quart de siècle. C’est dire qu’il travaillait très vite. Comme on dit: il a commencé trop tard et il est parti trop vite.

Il considérait ses collections comme formant un tout et il refusait de les voir fragmentées en vendant des pièces à gauche et à droite. C’est grâce à des mécènes que ses collections sont demeurées intactes et peuvent être mises à la disposition du public.

Maurice Gaudreault fut d’abord et avant tout un historien de la petite histoire (un artiste patrimonial) du genre Krieghoff ou Massicotte, cherchant à documenter à sa façon la vie des pionniers du Nord ontarien. On constate qu’il avait une mémoire photographique pour les détails. Je trouve aussi qu’il avait un sens aigu de la mise en scène. Ses pièces sont comme des acteurs disposés sur un plateau, comme des clichés dont on pourrait faire le tour. Il y a du réalisme dans ses personnages, un dynamisme aussi, un mouvement suspendu. C’est comme si l’image d’un film vidéo s’était figée et qu’un simple coup de manette pouvait remettre tout en mouvement.

Ces pièces sont sculptée dans de l’argile du Nord. Il paraît qu’elles contiennent toutes de la salive de l’artiste (ça me fait penser à Jésus qui fait de la boue avec sa salive pour guérir un aveugle). Elles sont de terre cuite partiellement émaillée. La combinaison des deux matières, les sujets choisis et la bonhomie de la plupart des personnages donnent une allure naïve à une œuvre d’un art consommé. Il avait commencé comme artisan potier, mais son talent et sa maîtrise n’ont cessé d’évoluer jusqu’à ce qu’il soit reconnu et qu’il se reconnaisse lui-même comme un artiste. Les dernières années, il gagnait bien sa vie à pratiquer son art, ce qui est rarissime en Ontario français.

C’est lorsqu’il a appris qu’il avait la leucémie que M. Gaudreault a décidé de reconstituer la vie de Jésus à sa manière. On me raconte que c’était un homme très accueillant, très gentil. Les gens qui lui parlaient une fois s’imaginaient être devenus ses amis. Ce n’était pas un pratiquant si on entend par là quelqu’un qui fréquente l’Église, mais il mettait l’Évangile en pratique. Il avait une relation personnelle avec celui qu’on appelle Jésus.

Si vous prenez le temps d’examiner sous tous ses angles une œuvre de maturité de Maurice Gaudreault, surtout celles de la vie de Jésus, vous serez saisis par la beauté des scènes et des personnages. Les 300 quelques personnages (et les animaux, Maurice Gaudreault aimait les animaux) sont tous distincts, gardant leur identité d’une scène à l’autre (le visage de Jésus reste le même). Et le Verbe s’est fait glaise et il a habité parmi nous, grâce au talent de Maurice Gaudreault!